Black Sand Beach
2011
film couleur HD, son
Dans le film "Black Sand Beach", un arbre mort se tient debout le long d'une côte hawaïenne, soutenu par un enchevêtrement de racines, d'environ 2m de haut. La base du tronc de l'arbre semble flotter juste au-dessus de la ligne d'horizon, comme si l'archipel du Pacifique battait en retraite vers le centre de la Terre, exposant ainsi les parties habituellement cachées de la plante. Au son de la douce et apaisante mélodie de la guitare slack key dans le morceau "Sweet Lei Mokihana" (1973) interprété par Hui OHANA, on observe deux chiens trottant sur le sable noir. Ils sont bientôt rejoints par deux hommes assez âgés qui ressemblent à Lawrence WEINER et Jeff BRIDGES, comme si ces derniers avaient décidé de faire leurs adieux au monde de l'art et à la célébrité hollywoodienne pour passer leurs vieux jours à vagabonder et faire du surf. L'homme ressemblant à Jeff BRIDGES donne une petite tape au labrador brun ; celui ressemblant à Lawrence WEINER se balance doucement aux racines de l'arbre les plus hautes, puis ils quittent nonchalamment le cadre, suivis par les chiens. "Black Sand Beach", à tout point de vue, est un film dans lequel il ne se passe que très peu de choses, mais sa douce mélancolie le rend étrangement touchant. Sur cette côte, ces deux hommes avec leurs shorts et leurs barbes semblent attendre patiemment la fin du monde. (Tom MORTON)
Darvaza
2011
vidéo couleur HD, son
Dans son film "Darvaza" Adrien MISSIKA révèle la magie et beauté d'un cratère accidentel dans le désert du Turkménistan, dont s'échappe du gaz en combustion continue depuis 1971, appelé localement « la porte de l'enfer » : lors d'une prospection minière soviétique en 1970, une équipe de géologues, forant le sol à la recherche d'un gisement, perce accidentellement une cavité souterraine qui provoque l'effondrement de la tour de forage, laissant dans le sol un trou béant. Pour éviter les risques d'explosion et de pollution atmosphérique, il a été décidé de mettre le feu aux gaz qui émanent du puits. Les géologues estiment qu'ils doivent se consumer en quelques semaines, mais le puits brûle sans interruption depuis 1971. Cratère de feu filmé à ras du sol dans le désert du Turkmenistan, "Darvaza" fait écho à "Dome" comme réflexion plastique sur la forme simple et primitive du cercle. Un cercle de feu dont on attend confusément qu'il délivre une vérité primordiale, tel l'oracle de la pythie, "Darvaza" est l'équivalent « naturel » du dôme de NIEMEYER bruissant de mille sons indistincts.
Dome
2011
film super 8 transféré sur blu-ray, son
Dans le film Super-8 "Dome", un jeune homme anonyme explore une vaste construction en dôme d'Oscar NIEMEYER sur le site de la foire internationale de Tripoli au Liban. La construction du bâtiment fût arrêtée en 1975 lorsque survint la guerre civile au Liban. Depuis lors, il demeura inachevé et inaccessible au public. Alors que la caméra suit le jeune homme à travers le sombre édifice, on le voit passer les doigts sur les câbles d'aciers qui pendent le long des murs et des poutres, comme autant de touches de piano ou de cordes de guitare. Ses gestes transforment peu à peu la coupole de NIEMEYER en un gigantesque instrument de musique et l'emplissent d'une composition de bruits sourds, métalliques ou dignes de râles et qui résonne dans le bâtiment. Dans le plan final du film, on le voit escalader l'extérieur du dôme, comme un astronaute prêt à planter le drapeau sur un sommet vierge de la planète Mars, ou le dernier habitant d'une Terre maudite, tentant de héler un vaisseau spatial qui passerait par-là. Est-ce un début ou une fin ? Dans l'œuvre de MISSIKA, les deux possibilités cohabitent. (Tom MORTON)
Grand Prix
2009
vidéo couleur, DV transféré sur DVD
Diaporama d'un circuit automobile abandonné, "Grand Prix" mêle technologie de la contemplation – plan-séquence fixe face à la nature – et géométrie des formes filmées, déconstruction analytique du médium cinématographique – un morcèlement des séquences– et technologie de la nostalgie – le travelling que l'esprit reconstitue à partir de ces plans. A l'image d'une humble définition de la pratique artistique: formes et sentiments appliqués à un médium. Entre image fixe et cinéma – qui est, selon J.C. ROYOUX, la synthèse de l'appareil photographique et de la voiture – "Grand Prix" évoque, par la vitesse de défilement des séquences, la rapidité passée des courses révolues. Les vues, comme autant de strates, construisent alors une archéologie visuelle de ruines contemporaines exprimant, selon les mots de l'artiste, la « victoire du temps sur l'espace ». Endroit de rencontre entre le point de vue et le paysage global, la circularité du lieu envahie par la végétation se fait alors l'écho et l'écrin architectural d'une perception de la totalité du monde.
HMI
2006
vidéo couleur, son, DV transféré sur DVD
« HMI» (Hydragyrum Mittlere Bogenlänge Iod) est le terme allemand pour désigner les « lampes aux halogénures métalliques », éclairage de haute intensité utilisé sur les plateaux de tournage. L'installation vidéo retourne le questionnement de notre rapport au cinéma et à la photographie. Adrien MISSIKA filme un mur éclairé par ces lampes de cinéma. Ce premier film est à nouveau projeté sur un mur. La lampe s'allume avec un son violent, puis gagne lentement en intensité jusqu'à inonder la salle de lumière. Ce jeu brouille le rapport entre le sujet exposé et le visiteur en éclairant ce dernier. L'image suggère également un effet de science fiction, un lever de soleil ou évoque le big bang. L'ambiguïté de la sensation contraste avec la trivialité du procédé.
Monument versatile
2009
vidéo
Equivalent céleste de la vision minérale et végétale de "Grand Prix", "Monument Versatile" fait, suivant une même méthodologie, d'une architecture « humaine » – le célèbre jet d'eau de Genève – et d'un paysage naturel dénué d'aboutissement le théâtre d'un contre-évènement. Sur ce contre-monument, jet incorporel dont l'exceptionnelle hauteur est annulée par le cadrage de la caméra, seul un arc-en-ciel offre les derniers reflets d'une possible narration. Sorte de « signifiant flottant », ce signe immatériel est dépossédé de sa qualité symbolique pour atteindre un rang universel de l'élémentaire. Séparant les choses de leur fonction, Adrien MISSIKA fait un travail de sémioticien romantique, observateur et explorateur créant une phénoménologie de la nature et de son action sur ce qui ne constitue plus que les traces d'un homme absent, ou disparu.
Regarde les mouches voler
2012
vidéo noir et blanc, muet
"Regarde les mouches voler" s'ouvre sur différents niveaux temporels, d'asynchronisme et de changements de perception. Dans cette vidéo, une mouche traversant le champ de vision est enregistrée grâce à une technique d'imagerie médicale empruntée au domaine scientifique. Par l'exagération du ralenti et de l'anticipation constante, un mouvement ne pouvant normalement pas être perçu par l'œil humain est pourtant ici tracé. Chaque battement d'aile semble alors lourd et monumental. La temporalité du film est diamétralement opposée au temps réel du vol. Dans le même esprit que l'expression "regarder les mouches voler", l'œuvre d'Adrien MISSIKA illustre la stagnation et le mouvement de collision, créant une zone intemporelle au royaume de l'oisiveté et de l'ennui.
Sailing Stones
2011
film couleur HD, son
"Sailing Stones" est une vidéo portant sur une image animée qu'on ne pourrait pas voir bouger, et des pierres mouvantes qu'on ne pourrait pas voir rouler. Le film a été tourné à Racetrack-Playa, à proximité de la Death Valley. Un lac asséché parfaitement plat et encerclé par des sommets de dolomite. Sur le gisement de l'ancestral rocher d'argile fissuré, reposent plusieurs galets et blocs de pierres qui semblent s'être détachés de la falaise. Chaque pierre semble avoir voyagé le long du lit du rocher, laissant derrières elle les traces mystérieuses de son passage. Selon la description de la NASA, « certaines pierres voyagent deux par deux. Leurs deux pistes sont alors si parfaitement synchro, que ce soit le long des tronçons rectilignes ou des courbes, qu'elles semblent avoir été creusées par une voiture. D'autres se déplacent en roue libre, errant ici et là, seules, et parcourant parfois des distances équivalentes à plusieurs terrains de football. Dans de nombreux cas, les sentiers creusés s'achèvent au pied des rochers immobilisés, mais dans d'autres, ces férus de course ont disparu ». Le portrait par Adrien MISSIKA de ce site géologique porte sur une temporalité bien spécifique, une longue durée, une lenteur que nécessite ce paysage changeant et que nous ne pourrons jamais expérimenter au cours d'une vie humaine. Ce film étant composé de plusieurs longs plans fixes, le spectateur a d'abord la sensation qu'il s'agit de photos montées en vidéo tant l'impression de statisme est forte. Dans ce travail, MISSIKA place la peinture comme horizon de la construction des images (via le sujet éminemment Friedrichéen de l'immensité, du plan fixe de l'image, de la composition figée et de l'action réduite au minimum) mais utilise la vidéo pour susciter au spectateur une nouvelle sensation, celle de retrouver une conscience particulière du temps et du mouvement, indirect ou non. Si la photographie parvient à condenser le temps, capturant l'éphémère, le fugitif, le contingent et l'instantané, le film, quant à lui, est une succession de moments ou d'instants qui se chassent l'un l'autre. Dans le film, chaque changement de plan est brutal, mais, loin d'être fondue en un montage fluide, la vidéo est tout de même suturée, provoquant ainsi l'apparition du moment présent, à savoir l'espace-temps du spectateur, dans le domaine de l'œuvre d'art.
Tephra horizon
2013
vidéo HDV, couleur, son
Dans la vidéo Tephra horizon, la diversité des points de vue, tour à tour aériens, caméra à la main, panoramiques, plans fixes, comme la multiplicité des cadrages, en plongée ou contre plongée, de près ou de loin, sont autant de moyens de traduire une vision subjective et panoptique, une relation physiologique avec le Piton de la Fournaise. Adrien Missika sublime ici, dans une succession elliptique de plans contemplatifs, l'attraction et la beauté paradoxale d'un paysage, lunaire et désertique, calme en apparence et toujours menaçant qui, dans un processus de réversibilité, évoque à la fois l'origine et l'apocalypse, le devenir et la ruine. Cet environnement est le décorum d'un récit fictionnel. Un homme, à l'allure citadine, semble en quête. Il scrute, marche et prélève un fragment de lave qu'il fait tournoyer dans sa main pour en observer toutes les facettes et aspérités. Cette présence déconcertante reprend, non sans humour, les poncifs du romantisme, de l'homme face à la nature. Commandé au musicien Victor Tricard, avec lequel il collabore pour la quatrième fois, le « sound track » crée une ambiance sonore dont les dissonances répondent aux tressautements de l'image. Tout en spatialisant la vidéo, il contribue à son appréhension sensible par le spectateur. (Lionel Balouin)
Twelve Spinning Stones
2010
film HD, couleur, muet
Dans "Twelve Spinning Stones", différentes photographies de surfaces de roches ont été animées numériquement pour tourner et créer un tableau abstrait. Inspiré de la "Dream Machine" de GYSIN, c'est ici l'image qui bouge et le spectateur qui demeure immobile.
