Alfredo Aceto, Jack Greer, Ben Horns
11/09/2014 > 11/10/2014
Vernissage le 11/09/2014, de 19h à 21h
The Arcades Project est un recueil de notes et de textes inachevés du philosophe allemand Walter BENJAMIN, rédigés entre 1927 et 1940 et publiés à titre posthume, l'auteur y évoque les passages couverts parisiens et leurs enfilades de boutiques. C'est en flânant dans ces passages que Walter BENJAMIN a mûri un de ses concepts les plus célèbres, incarné par la figure du "chiffonnier", dont il compare l'activité à celle de l'historien, qui glane des fragments du passé et élabore un récit commun à partir de ceux-ci. Selon Walter BENJAMIN, la tâh;che de l'historien est moins la découverte de vérités absolues que l'assemblage de ruines afin de créer une mosaïque vivante.
La figure du chiffonnier est le trait d'union entre les artistes de cette exposition, dont les pratiques artistiques procèdent également de ce double geste de collection et de montage. Comme le chiffonnier, ils se servent de matériaux du quotidien, s'approprient des anecdotes et des histoires réelles aussi bien qu'imaginaires. Les divers fragments issus de la récolte initiale sont transformés en peintures abstraites ou en objets sculpturaux, donnant une nouvelle vie aux formes et aux idées. Ces ??€œuvres sont l'incarnation de l'idée chère à Walter BENJAMIN selon laquelle "le monde est présent dans chacun de ses objets".
Benjamin HORNS (né en 1989 à Willow Spring, Illinois, vit et travaille à Francfort) crée des peintures abstraites à partir de tissus achetés dans des grandes surfaces, privilégiant ceux aux imprimés géométriques qui rappellent les patterns iconiques de l'Art minimal américain, et sur lesquels il applique de l'eau de javel, de la peinture à la bombe ou des colorants. Les différents tissus sont ensuite liés entre eux par des fermetures éclair, l'artiste suggèrant ainsi leur interchangeabilité tout en introduisant de forts éléments de rupture dans la composition des toiles.
JACK GREER (né en 1987 à Los Angeles, vit et travaille à New York) passe son temps à fouiller l'atelier partagé du collectif new yorkais dont il fait partie, le Still House Group, à la recherche de chutes et de vestiges des ??€œuvres produites par les autres artistes afin de les intégrer à ses peintures patchwork. Cette récolte de "déchets" est un processus à la fois collectif et solitaire, magnifié par le travail méticuleux de JACK GREER qui les transforme en peintures abstraites à la composition rigoureuse. Pour cette exposition, JACK GREER a choisi de mettre l'accent sur deux auteurs de ces vestiges, Brendan LYNCH (avec la toile Finding Brendan) et Nick DARMSTAEDTER (Finding Nick), les deux artistes les plus récemment exposés à la Galerie BUGADA & CARGNEL.
Le travail d'ALFREDO ACETO (né en 1991 à Turin, vit et travaille à Lausanne) est mâtiné d'humour, à l'instar de la céramique qui accueille le visiteur dans la galerie par les mots "Welcome to the art world". Ses pièces enchevêtrent récits historiques ou personnels et références à l'histoire de l'art ; ainsi avec la série des "horloges", il réactive une anecdote chère à Walter BENJAMIN selon laquelle, durant la Révolution Fran?aise, des soldats tiraient sur les horloges de certains villages afin "de stopper le temps". Répétant ce geste, ALFREDO ACETO a pris pour cible des horloges du designer italien Aldo ROSSI, dans un effort pour rendre visible la manière dont les mémoires collectives et individuelles peuvent se rencontrer. Avec les Mask Paintings, ALFREDO ACETO s'approprie une technique de camouflage industriel, destinée à l'origine à dissimuler le design de nouvelles voitures lors des essais sur piste. Il en isole les motifs et les tamponne sur des tissus beiges ou verts, dissimulant au regard la peinture même. Surplombant l'espace d'exposition, une statue bleue de Saint Roch nous observe. Elle est la reproduction d'une petite icône qui était nichée dans le mur de pierre d'un village de montagne en Italie. Ce mur avait été peint en bleu pour les besoins d'un tournage, afin de servir de fond pour des incrustations vidéo. Sans ménagements pour la statue, elle avait été peinte en bleue avec le mur, les techniciens niant par là même son statut d'image.